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Myriam, l’autre Marie

06/12/2022

Myriam, l’autre Marie

« Chantez au Seigneur un chant nouveau, car il a fait des merveilles ; par son bras très saint, par sa main puissante, il s'est assuré la victoire. Le Seigneur a fait connaître sa victoire et révélé sa justice aux nations ; il s'est rappelé sa fidélité, son amour, en faveur de la maison d'Israël. » Le psaume 97 que nous prions en cette fête de l’Immaculée Conception de Marie fait directement écho à celui qu’entonna l’autre Marie, Myriam, la sœur de Moïse quand le peuple d’Israël fut libéré de l’oppression de Pharaon après avoir traversé la Mer rouge :

 

     « La prophétesse Myriam, sœur d’Aaron, saisit un tambourin, et toutes les femmes la suivirent, dansant et jouant du tambourin. Et Myriam leur entonna : « Chantez pour le Seigneur ! Éclatante est sa gloire : il a jeté dans la mer cheval et cavalier ! » (Ex 15, 20-21). C’est la première fois que la sœur de Moïse est nommée – même si sa présence salutaire a été discrètement évoquée au moment de la naissance de l’enfant (Ex 2, 4-8), et c’est bien de son propre nom que sera appelée la Vierge de Nazareth, Myriam, la « Dame » par excellence.  

 

    Le chœur des femmes, battant de leurs pieds nus la cadence sur le sable humide du rivage, fait écho au chœur des hommes qui ont entonné de leur côté le cantique de Moïse. Les unes et les autres, selon leurs charismes et leurs talents, alternent une même partition d’allégresse. L’action de grâce comme la joie demandent à être partagées pour s’élever jusqu’au trône de Yahvé. Myriam est la première à entraîner ses compagnes comme le feront plus tard Déborah, et la fille de Jephté se rendant au-devant de son père « dansant au son des tambourins » (Jg 11, 34), et aussi Marie et Elisabeth dans la célébration jubilante du Magnificat. Le chant qui s’élève témoigne de l’œuvre de Dieu, y associe les femmes, et appelle la réponse des hommes. Les hommes chantèrent, puis les femmes chantèrent, jouèrent du tambourin et dansèrent. Les hommes chantèrent leur joie devant la délivrance, chantèrent leur aspiration à une rédemption encore plus parfaite, mais quelque chose manquait. Une dimension que seule une femme pouvait apporter...

 

    Selon les traditions d’Israël, Myriam suscita et dirigea ce « Cantique de la mer », les rabbis faisant dériver son nom d’« amertume » (mar en hébreu) parce qu’au moment de sa naissance, le Peuple Juif était entré dans la phase la plus difficile de l’exil égyptien. Lorsque le nourrisson Moïse avait été placé dans une corbeille, sur le bord du Nil, Myriam « se tenait, l'observant pour voir ce qu'il adviendrait de lui » (Ex 2, 4). Et son chant s’éleva auprès des sources de Mara, la première étape de l’Exode, car ce fut Myriam qui, avec le puits profond de son expérience intime de l’esclavage, éprouva dans toute sa réalité l’amertume de l’exil. Ce fut Myriam, avec son aptitude féminine à l’endurance, à la persévérance et à l’espoir, qui se tint, seule, pour observer l’enfant qui fuyait dans une corbeille au fil de la rivière-tombeau. Myriam à la vigilance vive à l’égard de ce qui allait se produire, source intarissable d’espérance pour son peuple, est célébrée par la mémoire d’Israël comme Celle qui ne faillit jamais. Alors qu’aujourd'hui, nous nous tenons comme au seuil de la réalisation ultime du salut, ne convenait-il pas de laisser aux femmes, à Myriam et à ses compagnes, dont le chant est plus poignant, le tambourin est plus porteur d'espoir, la danse est la plus joyeuse, l’attente du Mechia'h plus forte que celle des hommes, d’être les premières notes jubilantes de la symphonie du Salut ?

 

P. Pascal-Grégoire