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Prendre le temps de lire et de méditer la Parole de Dieu

Le signe du maudit

03/04/2022

Le signe du maudit

La lecture prophétique de ce matin nous conduit devant la Croix. Aux temps anciens de l’Exode, alors qu’Israël venait de recevoir la Loi divine des mains de Moïse, l’Éternel enjoignit à son peuple de reprendre son itinérance. La marche au désert est âpre, difficile.

 Mille obstacles se dressent pour entraver la progression du peuple mais les périls les plus mortels renaissent sans cesse du cœur même des Hébreux : plaintes, révoltes, désobéissances, amertumes… Le peuple ne connaît plus la faim car tous les matins il fait sa provision de manne au goût de coriandre. Mais on évoque à voix haute et avec regret la viande  et le poisson du Nil, les concombres, les pastèques, les oignons et l’ail en oubliant les coups de fouets des garde-chiourmes qui agrémentaient le quotidien de leur vie d’esclaves. Et l’Éternel fit pleuvoir des vols de cailles qui s’abattirent sur les campements d’Israël. 

 

Peu de temps après, par l’envoi d’émissaires en Terre de Canaan, Dieu leur montra la richesse et la fécondité des terres qu’il allait leur donner, un pays de lait et de miel où abondent le raisin, les grenades et les figues. Mais là encore le peuple fit grise mine : trop dangereux de se risquer dans un pays déjà habité, et il refusa d’avancer plus en avant. Dieu ne sait plus quoi faire et se sent blessé devant tant d’ingratitude et de défiance. Cette génération au cœur oublieux ne pourra entrer dans la Promesse, la mémoire trop incertaine des merveilles de Dieu. Peuple étonnant et déroutant qui pour avoir expérimenté la tendresse et la force de Dieu se croit dispensé de tout effort quotidien comme de ses responsabilités personnelles et sociales. Dans ce surplace tant géographique que spirituel, des cris de révolte fusent habités de mille rancœurs et de frustrations ressassées.  

 

Ce fut le temps des serpents brûlants. Mais derrière ces reptiles à la morsure mortelle se dresse l’autre serpent, l’antique ennemi, celui de la Genèse qui insuffla au premier couple la méfiance et la jalousie à l’égard de son Créateur. Quiconque méprise la vie et l’amour, s’offre aux sirènes de la mort : « beaucoup en moururent dans le peuple d’Israël. Le peuple vint vers Moïse et dit : ‘Nous avons péché, en récriminant contre le Seigneur et contre toi. Intercède auprès du Seigneur pour qu’il éloigne de nous les serpents. » Moïse fit un serpent de bronze qu’il hissa au sommet d’un mât et le symbole même de leur désobéissance devint le lieu d’une guérison pour ceux et celles qui faisaient confiance à la  parole transmise par Moïse.  Le signe de la punition devenait la source du salut.

 

« De même que le serpent de bronze fut élevé par Moïse dans le désert, ainsi faut-il que le Fils de l’homme soit élevé » (Jn 3, 14). A mots couverts et choisis, Jésus évoque sa mort à venir, celle réservée aux « maudits » de Dieu selon le Livre du Deutéronome (20, 3), celle qui lui donnera de faire corps avec cette malédiction pour nous délivrer de toute malédiction ancienne, présente ou avenir (Ga 3, 13). La mort du Fils nous assure que la colère de Dieu a été écartée à jamais de nous, quelles que soient notre gratitude ou notre ingratitude. Bien plus,  continue Jésus, ce signe sera infiniment plus qu’une guérison passagère dans l’épuisement de nos vies, bien autre chose car  « Dieu a tellement aimé le monde qu’il a donné son Fils unique, afin que quiconque croit en lui ne se perde pas, mais obtienne la vie éternelle. Car Dieu a envoyé son Fils dans le monde, non pas pour juger le monde, mais pour que, par lui, le monde soit sauvé. » (Jn 3, 16-17). 

 

P. Pascal-Grégoire