Paroisse Notre Dame de l'Estuaire
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Paroisse Notre Dame de l'Estuaire
Prendre le temps de lire et de méditer la Parole de Dieu
31/03/2022
Les textes de la liturgie de la Parole nous font entrer maintenant dans le mystère de l’Envoyé qui se découvre de plus en plus cerné, traqué. Il n’y aura pas d’échappatoire pour lui. Sa fidélité à Dieu, son invitation à vivre l’Alliance d’un cœur renouvelé n’auront d’autre écho dans le cœur des puissants que le déchaînement de la violence et le goût du sang.
Tout se passe comme si pour supprimer l’insatisfaction et l‘inquiétude des hommes, il n’y avait d’autre solution que d’éliminer physiquement celui qui propose un chemin de vie. C’est déjà ce que nous faisait entendre hier le Livre de la Sagesse. Cela fut aussi l’expérience du prophète Jérémie.
Après la mort du roi Josias dont il était proche, Jérémie poursuivit sa mission de prophète sous le règne de ses deux fils mais après la première prise de Jérusalem par les Babyloniens, les tensions devinrent de plus en plus vives parmi les Judéens. Jérémie les presse de choisir une conduite qui soit à la hauteur des attentes de l’Éternel. Il demande de façon significative que soient affranchis les esclaves, entrant en conflit ouvert avec les grands propriétaires. La révolte gronde. Les puissants s’inquiètent et les princes dirent au roi Sédécias : « Que cet homme soit mis à mort : en parlant comme il le fait, il démoralise tout ce qui reste de combattants dans la ville, et toute la population. Ce n’est pas le bonheur du peuple qu’il cherche, mais son malheur. » Le roi Sédécias répondit : « Il est entre vos mains, et le roi ne peut rien contre vous ! » Alors ils se saisirent de Jérémie et le jetèrent dans la citerne de Melkias, fils du roi, dans la cour de garde. On le descendit avec des cordes. Dans cette citerne il n’y avait pas d’eau, mais de la boue, et Jérémie enfonça dans la boue. » (Jr 38, 4-6).
Jérémie n’en veut pas au Seigneur de cette suite continuelle de brimades et d’humiliations qui font cortège à son ministère. Nous l’avons entendu : il rend grâce au Seigneur de l’avoir averti et de lui avoir décillé les yeux devant les manœuvres des puissants. Innocent de leurs menées, il se compare à un agneau que l’on emmène à l’abattoir. Un Autre pareillement, pour avoir porté la parole incandescente de l’Éternel, sera mené à la mort et mourra sur le bois à l’heure où précisément on égorgeait dans le Temple les agneaux pour la fête de la Pâque. Aux yeux de l’Éternel, la mort du Juste se dévoilera comme le sacrifice unique et infiniment précieux qui fera passer notre humanité en son cœur de Père. Folie des puissants qui en mettant à mort le Juste, pensaient effacer de la terre toute référence à la justice, toute possibilité de justice. « Coupons l’arbre à la racine. » Si la prophétie de Jérémie désigne déjà l’arbre de la Croix, elle découvre aussi les desseins absurdes des méchants : cet arbre qu’ils s’échinent à abattre, n’est autre que l’Arbre de la Vie, l’Arbre célébré par le Psaume premier. Plutôt mourir dans sa folie que de consentir à saisir la main que Dieu nous tend.
Et Jérémie de clamer sa foi en la justice de son Dieu : « Seigneur de l’univers, toi qui juges avec justice, qui scrutes les reins et les cœurs, fais-moi voir la revanche que tu leur infligeras, car c’est à toi que j’ai remis ma cause. » Alors qu’il s’enfonçait lentement dans les boues de la citerne, Jérémie sera sauvé in-extremis par un étranger, un Éthiopien qui pressera le roi Sédécias de le faire délivrer. Jérémie verra la chute et la destruction totale de Jérusalem par les Babyloniens. A l’heure ultime, un Autre se tournera vers l’Éternel en désignant ses bourreaux : « Père, pardonne-leur : ils ne savent pas ce qu’ils font » (Lc 23, 34).
P. Pascal-Grégoire