Paroisse Notre Dame de l'Estuaire

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Paroisse Notre Dame de l'Estuaire

Carême 2022

Feu dans la nuit

11/03/2022

Feu dans la nuit

Chaque matin, nous nous proposons de glaner quelques morceaux de cette manne que le Seigneur donnait à son peuple pour le garder en sa marche et sa communion. Retournant au gré de la liturgie bien des pages et des voix, nous n’en voyons pas moins se dessiner une piste où le Seigneur nous appelle.

 Aussi goûterons-nous à la co-errance du désert qui mène à la Source de toute vie. Hier, un passage du Livre du Deutéronome nous avait poussé jusqu’à l’alliance de Dieu et d’Abraham. Et voilà que ce matin, nous retrouvons le même Abraham quelques chapitres plus hauts dans le récit de la Genèse. 

 

Dieu renouvelle son amitié à Abraham (Abram) en lui  promettant une descendance aussi nombreuse que la poussière infinie des étoiles. Abraham réitéra sa confiance au Seigneur et le Seigneur se réjouit de la foi de son ami. Aussi lui promit-il la terre où il se trouve comme son bien propre, son héritage. Pour Abraham, cela devient encore plus sérieux. Il n’y a pas que lui qui est en jeu mais aussi ses fils et ses fils de ses fils – même s’il n’a pas encore d’enfant. Alors il faut mettre cela noir sur blanc, passer un pacte en bonne et due forme. Ce qui est extraordinaire, c’est que Dieu ne discute pas et va chercher l’encrier pour rédiger l’acte… Enfin, c’est Abraham qui à la demande du Seigneur, va chercher une génisse, une chèvre, un bélier et deux oiseaux. Vous avez lu à quelle forme très bizarre de sacrifice Abraham se livre ensuite. 

 

« C’est un peu gore » diraient des plus jeunes mais ce rituel constituait la forme la plus haute de sacrifice d’alliance auxquels procédaient deux rois dans ces temps lointains du second millénaire avant notre ère. La symbolique en était très claire : de la même manière que les victimes avaient été tranchées, serait coupé en deux celui des deux partenaires qui trahirait la parole donnée ! Et ce qui devient tout à fait extraordinaire, c’est qu’au coucher du soleil, le Seigneur fait tomber un mystérieux sommeil sur Abraham, sommeil qui l’empêchera de prendre part en personne au rituel. C’est un peu comme si Dieu disait : « je prends sur moi d’assurer et d’assumer les deux parties contractantes... d’assumer aussi les risques de la défaillance de la partie humaine. »  

 

Comme si déjà se profilait à l’horizon de notre carême le mystère de la Croix. Osons aller un peu plus loin en lisant ces textes de la première Alliance à la manière des Pères : Dieu manifestera le passage de sa Présence par un brasier fumant et une torche enflammée. Cette image préfigure très probablement la nuée ardente qui précèdera le peuple d’Israël fuyant l’Egypte et passant par la mer « tranchée » (c’est le même verbe qui est employé) de la même manière que les animaux du sacrifice. Le brasier et la torche d’une même nature incandescente, la torche trouvant sa source dans le brasier : ne serait-ce pas le mystère d’un Dieu-Communion qui se laisse alors entr’apercevoir dans cette nuit obscure de nos premiers balbutiements de croyants ?

 

P. Pascal-Grégoire